Démolition

Le message

Petite note, si elle est lue un jour par quelqu’un : cet écrit est, je trouve, assez décousu. Peut-être qu’il est clair lorsqu’il est parcouru par un oeil nouveau, mais il me paraît si loin de ce que je ressens aujourd’hui. Je manque de précision et c’est super frustrant, ce n’est pas aussi libérateur que toutes les autres fois où j’ai publié sur mon journal…


Si je n’aurais pas dû être chez moi cette nuit, je me dis que j’échappe à une soirée qui m’aurait sans doute fait plus de mal que de bien. Si j’aurais dû me blottir dans les bras d’un homme ce soir, je me dis que j’échappe à une soirée qui m’aurait sans doute bien trop secouée.

J’ai failli faire une erreur, et je le sentais. Un peu avant de sortir de chez moi, j’avais le cerveau en feu, les jambes qui tremblaient et l’angoisse qui montait dans ma poitrine ; cela faisait quelques jours qu’un ancien crush me reparlait et on avait décidé de se revoir chez lui. Sauf qu’au fond, quelque chose n’allait pas. Sauf qu’au fond, je me forçais à être prête.

On avait beau passer nos journées et nos nuits à nous chauffer, à imaginer ce qu’on pourrait à nouveau faire ensemble et à s’envoyer des photos, il a fini par me faire comprendre que je ne savais plus faire semblant. Si je sais faire la différence entre amour et sexe, si, après tout, me faire du bien aux côtés de ce mec n’aurait jamais été la chose la plus désagréable qu’il soit, j’ai fini par dire la vérité. J’ai attrapé mon portable, j’ai répondu à un message dans lequel il me demandait si je me souvenais comment venir chez lui et il m’a alors sorti un "Ferme ta gueule et viens, petite pute. Fais ouaf pour voir ?".

Cela faisait plusieurs jours que ses propos étaient à la limite de l’humiliation ; et si certains trucs m’excitent lorsqu’ils sont dits dans le feu de l’action, d’autres, lorsque je suis en train d’angoisser, me font perdre toute ma libido. Je lui ai alors expliqué que j’avais la flemme de venir, que ça me gênait qu’il me parle comme ça. Puis j’ai fini de me préparer, persuadée qu’il allait s’excuser et me dire qu’il avait été trop loin - mais à la place, il m’a juste bloquée de partout après m’avoir sorti "Au final je suis trop fatigué, ne viens pas ce soir".

J’ai failli écrire que je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même, mais au bout du compte, cela m’a permis de passer la soirée avec ma famille. Il est vrai que je n’en mène pas large depuis tout à l’heure et que sa réaction me donne envie de vomir, mais après tout, c’est peut-être pour cela que je me sentais mal plusieurs heures avant d’y aller. Ce n’est pas la première fois qu’il m’insulte et que je me laisse faire, alors cette fois, j’ai simplement dit que cela pouvait me déranger. Il y a deux ans, il se calmait dès que je lui disais que ce n’était pas le moment, mais là, il a été très différent - et pas désirable du tout, de mon point de vue.

C’est une sensation indescriptible et déroutante ; et je me sens peut-être ainsi car j’étais juste curieuse de comment la nuit aurait pu se dérouler. S’il avait été quelqu’un de respectueux ou de juste gentil, nous aurions tous les deux passé un bon moment et il n’aurait pas eu besoin de me supprimer de partout. Qu’on se revoit de temps en temps ou que ce soit, un peu comme quand je l’avais vu il y a deux ans, un coup d’un soir qui ne débouche sur pas grand chose.

"Viens, je rigolais."

Il n’a pas apprécié que je le remette à sa place, et ce n’est donc peut-être pas plus mal que je sois seule ce soir. C’est dingue qu’il ait été piqué par ma franchise à ce point et qu’il ait carrément annulé notre rendez-vous alors que la seule chose qu’on voulait n’était de toute façon pas incroyable. J’avais juste envie qu’on me fasse du bien. Je dois me recentrer sur mon objectif premier : guérir.

Et puis, après cette petite désillusion, la réalité m’a frappée encore plus fort - et pourtant, ce début de soirée était déjà assez humiliant pour moi. J’ai reçu un pavé d’une vingtaine de lignes, un long message sur mon portable : ça venait d’Elsa, la maman de celui avec qui tout se passait bien à l’extérieur mais avec qui j’ai fini par comprendre qu’il fallait que je me soigne seule. La maman de celui que j’ai quitté, la maman du mec dont je parle dans ce post.

"...et je ne sais toujours rien de plus d’ailleurs… car je suis entourée de mecs qui ne s’expriment pas..."

Elle me dit qu’elle vient d’apprendre seulement aujourd’hui que nous ne sommes plus ensemble et que cette annonce l’affecte profondément. Elle culpabilise et se sent démunie car autour d’elle, elle n’a plus qu’un homme et des fils qui ne lui parlent pas. C’est vrai que dans la famille, c’était assez spécial et difficile de discuter ; ce contraste d’une maman sociable et de mecs silencieux faisait presque cliché. Elle me fait comprendre qu’elle culpabilise sur énormément de choses dans sa vie et qu’elle aurait adoré rencontrer mes proches, qu’elle aurait aimé discuter avec ma maman.

J’ai pleuré. J’essaierai de lui répondre demain, elle qui n’aura de toute façon aucune explication de mon ex copain tant il ne dit rien.